L’entame voit Omar Porras aligner un pas de deux avec la servante, cette lampe protectrice qui éclaire l’espace scénique entre deux représentations. En découvrant son nombril d’acteur «cabot» voulant désespérément attirer l’attention sur lui, il l’éteint. Noir plateau et belle mise en abyme de l’ego.
S’ensuivent autoportraits dansés ou chaplinesques duos engagés dos public, dans ce Cabots qui rassemble sur les planches le metteur en scène et comédien Omar Porras et le chorégraphe et danseur Guilherme Botelho. Signée à deux, la proposition est à découvrir jusqu’à samedi au Théâtre Forum Meyrin. Les Cabots rapatrie tout ce que l’on avait oublié du théâtre et que Pina Bausch s’est chargée de nous remémorer. D’abord, chez nos deux clowns marionnettiques, son expressivité outrancière, où le corps débonde des gestes hectiques, somatiques. Voyez Porras et sa panoplie de gimmicks tricotant bras et jambes au fil de contorsions enfiévrées. En perro romantico (chien romantique) des rues, Botelho exécute, lui, un pathétique numéro forain qui rappelle la danse du filet empaumée sous contrainte par le beckettien Lucky (En attendant Godot). Autre assassinat politique abordé, celui de Martin Luther King. Longuement, les corps pendent, têtes en bas, bassins soudés aux deux bords opposés d’une table. Ils dessinent ainsi un monolithe mémoriel pour mieux ressusciter, en voix off, la parole du pasteur baptiste. Avant que deux coups de feu ne fassent rouler les corps au sol et Luther King dans le négatif de son rêve. Toutes ces trouvailles réconcilient l’inventif spectacle autofictionnel avec la grammaire chorégraphico-théâtrale la plus originelle, et ses illusions les plus archaïques. L’oralité est ici un corps habilement inscrit à même le texte, et non pas représenté par l’écriture. |
L’artiste et l’histoire, Botelho et Porras chorégraphient leur rencontre scénique
24 février, 2012